Julien a 5 ans et son Papy vient de mourir. Il ne le sait pas encore mais il voit bien que maman et papa sont tristes et qu’ils ont les yeux humides quand ils le regardent. Quand il vient les voir pour les demander pourquoi ils sont tristes, les grands ne lui disent rien. Ils le renvoient jouer et s’affairent à leurs histoire de grands.
Finalement, hier maman a pris Julien dans ses bras et lui a dit que Papy était parti au ciel. Du coup, Julien passe des heures à la fenêtre à regarder le ciel pour voir si Papy ne va pas passer par là et lui faire un petit coucou comme il a l’habitude de le faire.
Les grands chuchotent quand il est là et il a passé samedi dernier chez sa marraine alors que papa, maman, mamie, tante Lucie et son mari sortaient tous habillés de noir.
Il n’est pas idiot quand même, il se passe quelque chose. Mamie lui a dit que Papy était parti et qu’un jour elle le reverrait. Ca l’a plongé dans une tristesse sans mot. Qu’est-ce que tout cela veut dire. Les grands ne lui disent pas tout !
Julien, comme tous les enfants, capte de nombreux messages verbaux et non verbaux de son entourage. Il a compris que quelque chose de grave s’était passé mais les mots n’ont pas été CLAIREMENT posés sur ce qui se passe. En voulant le protéger, les adultes le plongent -malgré eux- dans l’angoisse et ne lui permettent pas de comprendre ce qui se passe et de partager avec eux sa peine.
Il suffirait de lui dire que Papy est mort mais qu’il vivra toujours dans le coeur de tout ceux qui continueront à penser à lui. Et aussi de l’emmener avec eux au cimetière pour qu’il puisse voir son Papy et lui dire au-revoir une dernière fois. Peut-être que ses parents pourraient l’inviter à faire un dessin ou à offrir une jolie pierre ou une fleur à son Papy. En tout cas, l’associer à cette disparition, sans entrer dans les détails que son âge ne permet pas de gérer, mais en donnant du sens à ce qu’il perçoit de toute façon.
Par ailleurs, les métaphores du type « il est parti », « il est au ciel » ou autre sont souvent prises à la lettre par l’enfant qui peut passer son temps à attendre le retour du défunt ou à le chercher partout.
Parler vrai et simplement à l’enfant, lui exprimer sa propre tristesse et l’aider à exprimer et accueillir la sienne. Voilà ce qui lui permettra de vivre son deuil puis de faire son deuil à son rythme. Et si, pour une raison ou une autre, l’enfant n’a pu voir le mort ou assister aux funérailles, les parents peuvent aussi lui proposer de faire un petit rituel avec lui. Par exemple, écrire ensemble une lettre pour Papy et la brûler ou la laisser partir dans le courant d’une rivière, ou encore la lire à haute voix sur un lieu qui fait sens pour l’enfant et son grand-père. Inventez avec lui un acte symbolique qui fait sens pour lui et lui permet de dire au revoir et d’exprimer sa peine... peut s’avérer très utile même si l’enfant était présent aux funérailles.
Il est aussi très important de déculpabiliser et de rassurer l’enfant. Dans sa "pensée magique », il peut croire que son attitude a provoqué la mort de la personne. Bien insister sur le fait que « ce n’est pas de sa faute ». Ne pas s’étonner que l’enfant continue à parler aux absents ou joue à faire le mort. C’est sa façon à lui de gérer l’évènement.
Selon le Dr Jean-Louis Crouan, la réaction de l’enfant à la mort est différente selon son âge :
- de 0 à 3 ans : il n’a pas conscience de la disparition de la personne mais fait tout de même «éponge» des émotions de l’entourage. Il peut souffrir d’une angoisse de séparation.
- de 4 à 6 ans : il a conscience de la mort mais la perçoit comme temporaire. Il a tendance à protéger ses parents dans la peine et a du mal à verbaliser sa propre souffrance
- de 7 à 10 ans : il comprend le côté irréversible de la mort mais se sent parfois coupable.
- adolescent : c’est une période à risque car il vit une période insécurisante à d’autres niveaux. Ne pas hésiter à lui proposer un accompagnement.