Peu de couples affichent leurs difficultés à vivre une sexualité épanouie lors de leur première séance de thérapie. Cela tient à plusieurs facteurs.
Tout d'abord, il n'est pas facile de parler de sexualité face à de parfaits étrangers et encore moins d'évoquer des difficultés, alors que tous les magazines étalent des recettes diverses et variées pour vivre une sexualité "performante" (plus d'orgasmes, plus de plaisir, plus de rapports sexuels, plus de positions, plus, plus...). Ensuite, la sexualité est complètement intriquée à tout ce qui se vit dans le couple : comment la communication passe-t-elle, comment chacun se sent-il nourrit dans la relation, comment le couple trouve-t-il son espace pour vivre son intimité lorsqu'il y a des enfants et/ou beaucoup de travail ?
Mathilde n'a pratiquement plus de relations sexuelles avec son mari. Elle n'a plus d'élan. En revanche, elle se sent très attirée par un collègue de travail avec lequel elle a de nombreux échanges qui la nourrissent affectivement et spirituellement. Elle ne veut pas tromper son mari et se trouve coincée entre une attirance qu'elle ne peut satisfaire et une difficulté à aller vers son conjoint.
Georges a peu de relations sexuelles avec sa compagne plus jeune. Elle réussit brillamment professionnellement alors qu'il est en pré-retraite et cherche à donner un nouveau sens à sa vie. Il est tellement stressé que ses rapports ont a peine le temps de commencer qu'ils sont déjà terminés. Il souffre d'éjaculation précoce et n'ose en parler à personne tellement il se sent honteux, dévalorisé dans son rôle d'homme.
Leurs cas et ceux de bien d'autres sont plus nombreux qu'on ne le pense. Et les recettes sur les positions, les zones érogènes, les différentes pratiques, etc. ne viendront pas répondre à la détresse qu'ils vivent.
La sexualité est davantage un symptôme de quelque chose qui se vit mal ailleurs dans le couple que la source des difficultés qu'il rencontre. Pour autant, son absence ou son mal vécu va renforcer la problématique, alimentant ainsi un cercle vicieux. Par ailleurs, les difficultés sexuelles peuvent également trouver leurs racines dans notre histoire familiale.
Il serait par exemple intéressant de savoir si Georges n'a pas, parmi ses ascendants, un homme qui a eu le sentiment de se faire avoir : soit en devant se marier pour cause de grossesse, soit en assumant la paternité d'un enfant qui n'était pas le sien.
De même, pour Mathilde, il serait pertinent de se demander s'il n'y a pas des mémoires d'infidélités dans sa famille voire d'abus sexuel. En effet, vivre une relation platonique peut lui permettre de constater qu'elle peut être aimée pour ce qu'elle est, indépendamment de la sexualité ou encore lui montrer qu'elle peut résister à un schéma de reproduction familial.
Bien sûr, des causes organiques peuvent être mises en évidence. Toutefois, une approche globale du couple et de la relation est toujours plus riche. De nombreuses questions peuvent être proposées au couple :
- quels sont les besoins et attentes de chacun?
- qu'est-ce qui donne à chacun le sentiment d'être aimé? (voir l'article sur les 5 Langages de l'amour)
- comment se répartit le territoire de la maison? A qui appartient-elle? Et les meubles?
- quelles sont les tâches familiales dévolues (souvent implicitement) à chacun?
- comment se répartissent les revenus et les dépenses au sein du couple?
- quel temps chacun s'accorde-t-il pour lui-même et pour le couple?
- comment chacun se débrouille-t-il pour éviter l'intimité (TV, travail, enfants, activités, sommeil...)?
- quelle place laisse-t-on aux contacts non sexuels (massages, main dans la main, câlins, etc.)
De même, nous invitons à prendre du recul sur ce que chacun croit être la NORME. Chaque couple fonctionne différemment et peut trouver son équilibre de façon créative. C'est le niveau de satisfaction et de bien-être de chacun qui va servir de mesure et ceci varie aussi dans le temps car chaque étape de vie invite à une sexualité différente. L'humour et le jeu ne peuvent se réinviter au sein du couple que si les problèmes connexes sont abordés et traités. Sinon, la sexualité est vécue comme une ARME pour faire payer à l'autre des frustrations, quitte à se fruster soi-même...